sed a écrit:As-tu mis ça en perspective avec l'arrivée tardive de l'éducation des femmes ou bien tu rentres vraiment dans la peau de Rebloch?
Ou alors tu estimes que tu as déjà tout vu tout lu, que 100 ans de vie (la tienne en l'occurrence) c'est trop court pour que tu tombes sur une auteure femme assez bonne pour te faire nuancer tes propos.
Cette idée, pas mal répandue par les féministes, ne tient pas si l'on examine l'histoire de la littérature. Déjà je parlais d'écriture romanesque, ce qui veut dire que je ne mets pas en cause des Sappho, des Marie de France, la correspondance de madame de Sévigné ou les essais de Germaine de Staël, juste pour citer ce qui me passe par la tête en ce moment. Au XVIIe siècle, les femmes tenaient les salons. L'éducation tardive des femmes, c'est un mythe quand on parle d'époque où seule l'élite était éduquée. Mais dans tout cela on ne parle pas de roman.
Les femmes ont eu tout le XXe siècle pour publier des romans et elles l'ont fait abondamment, pourtant j'en vois peu sur cette période qui laisseront autant de traces que leurs collègues masculins. Les grands romans sont hantés par l'argent, la violence, la politique, la barbarie, la philosophie, le style, le lyrisme, là où les romans de femmes se baignent dans l'intime, la famille, surtout ses secrets, la propreté et, il faut l'avouer, une certaine tentation du bavardage. Je n'ai aucune idée de la cause de ce que j'avance. Peut-être que les hommes qui n'ont aucune aptitude à l'enfantement subliment dans l'art les vies qu'ils ne peuvent pas créer avec leurs chairs, c'est une théorie qui ne vaut pas grand chose, mais ayant bu pas mal de bières et ayant encore de la MD dans le sang, je me permets de la lancer ici.
Pourtant les femmes savent chanter et elles le font divinement bien, c'est pour cela qu'elles font des grandes poétesses, et si naturellement encore. Plutôt que de courir les rentrées littéraires, de nous infliger des Elfriede Jelinek, des Marie N'Diaye, de faire survivre la psychanalyse de bazar tout en s'abreuvant en cachette de romans historiques minables, elles devraient réhabiliter l'un des genres les plus nobles de tous, mais aujourd'hui le plus oublié, la poésie.
M. Maurice a raison, on n'a pas le temps de tout lire, ni en cent ans, ni en deux cents. Je n'aurai peut-être pas le temps de lire le Cid ou tout Shakespeare, la vie file trop vite, alors je ne vais plus m'emmerder avec des Despentes. Pourtant, je laisse toujours sa chance à quelqu'un, et quand on me bassine trois fois avec une romancière, j'y vais mais suis toujours déçu, je me promène comme Diogène, avec ma lanterne allumée en plein jour, à la recherche d'une femme qui écrive des romans. Le jour où j'en trouverai une, je lui écrirai un mail de remerciement. Pour l'heure, cela m'a surtout donné envie de lire Emily Dickinson et d'écrire quelques lignes pour dire combien je l'aime.