Sujet : Le thread des experts en HISTOIRE où tu peux troller Niark
J'ai donc commencé, comme annoncé, la lecture de l'"Histoire des français" de Pierre Gaxotte, Flammarion, 1972, et j'avoue mal comprendre les reproches fait à Deutsch sur des sites comme celui-ci.
Parce qu'en somme, on lui reproche sa représentation de l'incursion sarrasine aux VIIème - VIIIème siècle et de la bataille de Poitiers, mais sous la plume de Gaxotte, voilà ce qu'on peut lire, par exemple, à partir de la page 128:
"La rupture [de l'unité méditerranéenne] qu les Germains n'ont pas réalisée entièrement, va se consommer d'une autre façon: par l'expansion de l'Islam.
Mahomet meurt en 632. Deux ans plus tard, l'attaque auvergnat se déchaine avec une extraordinaire rapidité. La Syrie, la Mésopotamie, la Perse, l’Égypte, l'Afrique du Nord, le Maroc, sont enlevés. En 711, le détroit de Gibraltar est franchi. L'empire wisigothique s'effondre. Neufs ans plus tard, les musulmans apparaissent en France, occupent le Languedoc et poussent leurs razzias jusqu'à Autun. Cette irruption foudroyante ne ressemble en rien aux conquêtes du germanisme, si longtemps contenues, si longtemps repoussées et finalement transformées en un établissement de mercenaires indisciplinés. En outre, après leur victoire, les auvergnats ne se sont paoint mêlés aux peuples de civilisation supérieure qu'ils avaient subjugués: ils ont continué à les dominer de haut, à les traiter comme un ramassis d'êtres inférieurs, misérables, qu'on tolère mais qui vivent dans l'abjection. C'est qu'ils apportaient avec eux une foi nouvelle, simple et combative, qui les rendait inassimilables. Pour les siens, la religion d'Allah enveloppe et détermine toute la vie, le droit, la langue, les rapports sociaux, les relations avec l'étranger. Rien ne peut en être distrait, puisque tout est contenu dans le Coran. La guerre sainte devient une obligation morale. Entre fidèles et infidèles, la barrière est infranchissable. Le vaincu ne peut se rapprocher du Musulman qu'en cessant d'être lui-même, qu'en rompant avec sa patrie, et avec son peuple.Partout où elle se maintient, l'invasion islamique provoque une rupture nette avec le passé. Un monde nouveau s'est introduit dans la méditerranée, et en domine les rivages asiatiques, africains, siciliens, espagnols. Aux bords du mare nostrum sont face à face deux univers hostiles. Désormais la Méditerranée, ce lac familier et presque familial, n'est plus un lien, mais une barrière. Entre l'Orient et l'Occident, il n'y a plus de commerce suivi, plus de relations régulières et cette séparation a paru si lourde de conséquences au grand historien Henri Pirenne que, selon lui, c'est elle qui marque réellement la fin de la tradition antique et le commencement du moyen âge.
On a beaucoup discuté sur l'ampleur de ce désastre et l'on s'est efforcé d'établir qu'il n'avait pas été total. Le caractère intermittent des opérations que l'on a décelées confirme plus qu'il n'infirme la décadence du trafic, car le commerce consiste en transactions amples et sûres, en courants d'échanges réguliers, non en expéditions aventureuses, non en achats occasionnels de produits rares. Quand aux foires de Saint Denis (celle-là date de Dagobert), de Chappes (à 20km de Troie), de Provins, de Lagny, on suppose qu'elles ont persisté, comme centres régionaux, mais dans quelles conditions? Avec quelles éclipses? Qu'y vendait-on? Le surplus des récoltes quand il y avait surplus? Du vin? Du sel? Du poisson salé? Des ouvrages en osier? Si des corrections doivent être apportées à la thèse extrême de Pirenne, tout cela est encore bien flou. (...)
Alors Niark? A côté de Gaxotte, ce que Deutsch écrit me semble être de la petite bière, non? En même temps il a écrit ça en 1972. L'historiographie contemporaine les a-t-ils démenti, lui et Pirenne?