Sujet : Irlande fuck yeah ! Shamrock 'n' roll ! [Part 2]
Bon, je viens d'y passer dix jours là. Quelques petits conseils, ô grand Reblochon, pour le cas où tu veuilles faire preuve d'expertise internationale IRL :
L'Irlande, le matos pour partir :
- combinaison intégrale en Gore-Tex... ou juste les pompes, au bout d'un moment on s'habitue et on fait comme les blédards et on reste en tee-shirt ;
- une bête de tente, mais genre un truc vraiment solide et imperméable, la nôtre a été niquée en trois jours à cause d'une tempête, faut vraiment un truc Annapurna ready si on ne veut pas passer des heures à écoper. Ah, et un petit conseil : si on se réveille à six heures du mat' (ou on va se coucher) et qu'il faut partir, et qu'il ne pleut pas, alors on démonte la putain de tente, car mathématiquement, si on prend cinq minutes pour prendre une douche, il repleuvra (oui, c'est de l'indicatif, pas du conditionnel), on ne le répétera jamais assez, Murphy est un nom irlandais ;
- une carte bleue blindée ; les prix sont plus élevés qu'à Paris, quelques exemples :
- 10 € par personne pour une place de camping (plus 2 € par douche), le camping sauvage reste possible selon les coins ;
- 2,15 € (!!!!!!) la canette de bière /o\ - j'y reviendrai ;
- 8,50 € le paquet de blondes, 4,50 € le paquet de 12,5 g (!!!!!!) de tabac /o\, il faut donc prévoir des cartouches en fonction de sa consommation ;
- 4 € la pinte dans le moindre bled paumé qui n'a pas vu un touriste depuis dix ans ;
- 10 € pour bouffer dans un fast-food ;
- une Bible - c'est pas pour le pays, très catholique comme on le sait, mais pour l'éventualité d'un voyage avec Ryanair ;
- un paquet de chewing-gum - idem, les pilotes de Ryanair adorent taper des descentes de 10 000 pieds en 40 secondes ;
[putain, je me réveille à peine, je cherche la vodka à terminer, et je tombe sur une putain de boulette de shit alors que je ne fume pas, quand je vous disais que Murphy me poursuivait...]
- un Lonely Planet ; alors j'ai toujours eu l'habitude de cracher sur ce genre de trucs, en bon geek qui trouve de l'internet partout, mais l'Irlande et Google ça fait deux, donc savoir qui on va réveiller quand on débarque à minuit quelque part, ça peut être utile vu que les B&B, les auberges de jeunesse ou les campings ne sont référencés nulle part, même pas dans les offices de tourisme - on peut tenter chez l'habitant, c'est pas difficile, mais aléatoire ;
- un appareil photo, un vrai, pas comme le mien ;
- un drapeau anglais - toujours utile pour se torcher en public.
Où aller ?
On a fait que trois comtés, on n'a pas été dans la partie envahie par ces connards de sous influence britannique, donc ça va être court, mais je rajouterai des infos quand j'y retournerai :
- le comté de Clare (ville principale, Ennis) : ça ressemble un peu à la comté des Hobbits, Ennis est une chouette ville, mais c'est un peu chiant comme chez les Hobbits en fait. La météo est radieuse (il arrête de pleuvoir une heure par jour), mais à part les falaises de Moher et les pubs, y a rien à faire ;
- le comté de Galway (ville principale, Galway) : alors c'est simple, y a ceux qui viennent voir les lacs, les Français, à cause d'une obscure chanson d'un protest-singer de droite, et ceux qui viennent voir les montagnes et les courses de chevaux, les Irlandais.
Galway c'est une ville très anglo-saxonne, enfin je dis surtout ça parce que tout le monde est déchiré à 21 heures et parce que y a des armées de vingtenaires déguisées en putes dans les rues, donc, d'un strict point de vue de geek, il n'y a rien à redire. Mais ça fait quand même usine à pubs bien que la ville soit très jolie. On a squatté entre deux terrains militaires où on voyait partout ce genre de panneaux :
Apparemment, tout le monde s'en tapait. C'est un peu comme avec les keufs qui zonent partout, comme des santons de Noël, sous des panneaux interdisant ceci ou cela, indiquant des numéros anonymes pour balancer ceci ou cela, et des caméras omniprésentes donnant l'impression de passer des vacances à Loft O'Story, mais qui en fait en ont à peu près autant rien à foutre que du premier gonocoque qu'a choppé Deirdre en allant fricoter avec Shannon après l'église, ou bien était-ce Duffy ?
Il faut juste noter qu'à Galway la teuf commence lundi soir et finit quelque part dans la nuit de dimanche à lundi, le voyageur prudent esquivera donc le lundi après-midi.
Le comté de Galway, c'est aussi le putain de Connemara et le massif des Twelve Bens. Que dire ? Les lacs chantés par Sardou sont des marais tourbeux, ce qui suffit à les rendre sympathiques, mais les montagnes, putain, je vous laisse regarder sur wikipedia (j'ai pas d'appareil photo, je vous ai dit), ça décalque tellement que ça m'a fait presque oublier le départ de Napalm.
Il y a un seul vrai problème dans cette région, c'est que quand on vous adresse la parole, on vous dit "bonjour" et qu'on y vend des baguettent un peu partout, donc, on a bougé dans le comté de :
- Donegal (ville principale, Donegal Town) : c'est tellement énorme et magique, ça met tellement une claque, et il faut tellement le préserver du tourisme, que je n'en dirai pas un mot.
Comment se déplacer ?
Vous avez une bagnole ? Non ? Mmmpfff... hrhrhrhr... hinhinhin... ben une médaille de Saint-Patrick vous sera sans doute plus utile qu'un plan des transports en commun. J'ai une copine qui me disait après avoir baroudé pas mal dans les pays pauvres : "l'Irlande c'est l'Afrique de l'Europe". Je ne comprenais pas bien, l'Irlande est sauvage et rurale, ce dont personne n'a idée de se plaindre, mais pas de quoi y voir le tiers-monde. Et puis je compris en cherchant simplement à m'y déplacer, amèrement, et pourtant, j'ai été en Hongrie ou en Belgique.
C'est simple, pour faire 200 bornes, il faut à peu près six heures de bus :
- en admettant qu'il soit à l'heure ;
- en admettant qu'il arrive tout court ;
- en admettant que le chauffeur vous laisse grimper parce que vous n'avez pas la monnaie au centime près ;
- ou qu'il vous laisse grimper dans le seul bus de la journée parce qu'il est déjà complet.
Il manque les cages à poules, certes, mais Belinda qui hurle dans son portable que Ryan (ou était-ce Duffy ?) ronflait ce matin à cause de sa gueule de bois fera bien l'affaire.
Oui mais le stop ? Le stop en Irlande, d'après les rares personnes qui nous ont pris, c'est terminé, kaput. Il y a dix ans, les Irlandais se sont fait un max de pognon grâce à l'UE, et maintenant le pays est rempli de prolos qui roulent en mercos et en SUV. Alors le vieux O'Daughertyshinoflanon qui lève le pouce pour aller vendre une peau de mouton sur le marché de Ballyshanon (et surtout histoire de lever une pinte chez Dorian's pour oublier Mrs O'Daughertyshinoflanon, attendu que, selon la sagesse populaire irlandaise, une femme acariâtre est la troisième plaie d'Égypte après un toit qui fuit et la fumée de la cheminée qui rentre dans la maison), et bien c'est terminé. Le vieux O'Daughertyshinoflanon il y va en Toyota, et il fait un sourire à ces connards de hippies qui squattent sur la route depuis deux heures en attendant qu'un hypothétique couple de lesbiennes londonniennes veuillent bien leur faire faire dix bornes.
Oui, mais les dix bornes, pourquoi pas à pieds ? Parce que marcher sur une route irlandaise, c'est un peu comme déclamer un discours de Thatcher dans un pub. Imaginez des routes perdues où les bagnoles ont le droit de rouler à 100, où il n'y a pas de keufs, pas de radars, et pas de voies piétonnes sur les côtés qui sont en général bordés par des barbelés et remplis de guêpes vicieuses. Avec une bière à la main, c'est impossible - et en plus ça attire les guêpes. Et pourtant, j'en ai bouffé de la nationale avec mon sac à dos, mais là-bas, c'est la première fois que j'ai déclaré forfait.
La langue :
J'ai été agréablement surpris, c'est beaucoup plus simple qu'on m'avait dit - mais j'avais déjà testé l'accent du sud en Floride. Si vous vous en sortez en anglais, il n'y a aucun problème, et dès que vous avez un coup dans le nez, les Irlandais sont ravis de vous apprendre toutes les saloperies possibles et imaginables en gaëlique : pogue mahone !
Les Irlandais :
Ah bah si tout le monde y va, c'est pour ça - enfin, il y a les paysages et la musique aussi. Tout a déjà été dit : l'accueil irlandais est le meilleur du monde - quand on n'est pas anglais, et encore. Comme m'a dit une traveleuse là-bas : "vous n'allez pas pleurer parce qu'on se prend des océans sur la gueule pendant 23 heures par jour, en Irlande, j'ai jamais dormi dans mon camion." En effet, pas besoin de pleurer, le pays le fait déjà, et il y a toujours cinq ou six pubs ouverts jusqu'au petit matin