Sujet : Grève: je n'y comprend rien
Mais alors rien de rien.
Lundi, la situation était bloquée, les syndicats réclamaient une négociation nationale avec l'Etat, tandis que l'Etat refusait pour préférer des négociations enjeanrise par enjeanrise. Ca a son importance: dans le cadre d'une négociation globale, tu peux influer sur le texte que le gouvernement soumettra au Parlement, autrement dit les principes qui guideront la réforme. Dans une négociation enjeanrise par enjeanrise, tout ce que tu peux faire, c'est aménager les conséquences, mais tu n'as plus possibilité d'influer sur les principes.
Mardi soir, juste avant de rentrer dans la grève, le patron de la CGT fait une déclaration dans laquelle il dit accepter les négociations enjeanrise par enjeanrise à condition qu'un représentant de l'Etat soit présent.
Ca n'a l'air de rien là encore, mais c'est majeur. Ca veut dire que ce syndicat, qui était jusqu'ici sur une ligne de refus, admet la réforme dans son principe. Bref, c'est l'occasion d'un triomphe du gouvernement: il a réussi à rallier à sa réforme bon gré mal gré une des principales centrales syndicales. C'est aussi l'analyse d'un gars qu'on peut entendre là.
Je suis sans doute un simple d'esprit, mais j'aurais été le gouvernement, j'ouvrais tout de suite des négociations sur ces bases, histoire de mettre la CGT au pied du mur.
Mais ce n'est pas ce qu'a fait le gouvernement mercredi.
Au contraire, on a eu droit à des déclarations du gouvernement appelant à la reprise du travail avant toute négociation.
Et c'est là que je ne comprend plus, par exemple, cet article du monde.
François Fillon a invité, samedi 17 novembre, les organisations syndicales à lancer un appel à la reprise du travail à la SNCF et à la RATP pour permettre l'ouverture de négociations dans les enjeanrises sur la réforme des régimes spéciaux de retraite.
"Chacun comprend bien qu'on ne peut pas négocier et faire grève en même temps et qu'on ne peut pas à la fois refuser le principe de la réforme et exiger de négocier sur le retrait de la réforme", a déclaré le premier ministre lors d'une conférence de presse à l'issue d'un séminaire gouvernemental sur la future présidence française de l'Union européenne.
(...)
Raymond Soubie, conseiller social de l'Elysée, avait affirmé auparavant sur Europe 1 que le gouvernement ne mettait "absolument aucun préalable" à la négociation
Je n'y comprend rien. La déclaration de Fillon semble poser la fin de la grève comme un préalable à l'ouverture de négociations, mais l'argumentation est obscure. La décision de la CGT d'accepter les négociations enjeanrise par enjeanrise marque justement son acceptation du principe de la réforme et le fait qu'elle cesse de demander son retrait, pour se concentrer sur l'aménagement de ses effets. Donc on fait comme si faire grève était un refus de négocier, alors que ce n'est pas le cas.
Et pour compliquer le tout, on a une déclaration complètement contradictoire de l'Elysée qui affirme qu'il n'y a aucun préalable à la négociation. Ca voudrait dire que la présidence et le premier ministre ne seraient pas sur la même longueur d'onde?
Je nage complètement.