Aujourd'hui et pour terminer Ce monde qui vient de Minc, une citation un peu longue (élaguée du verbiage par mes soins) tirée du dernier chapitre intitulé très sobrement "Le village Gaulois" :
« Troisième chantier : mesurer, avant de s’y attaquer, le paradoxe qui fera cohabiter en France le plein emploi pour ceux qui peuvent et qui veulent travailler, l’existence de plusieurs millions d’exclus et le recours massif à l’immigration […] Avec un taux de chômage de l’ordre de 10 %, employer le mot même de plein emploi relève du sacrilège. Et pourtant il existe, à une précision cardinale près : pour ceux qui peuvent et qui veulent travailler. Quand une économie souffre simultanément d’une pénurie d’informaticiens et de serveurs de restaurant, de spécialistes des télécommunications et d’ouvriers du bâtiment, donc de postes très spécialisés et peu qualifiés, elle connaît le plein emploi. Mais celui-ci ne concerne qu’une population bien circonscrite.
[…] la restriction du plein emploi à ceux qui veulent travailler, elle acte une réalité indicible : la présence, dans les statistiques du chômage, de « chômeurs rationnels » […] parce qu’entre les indemnités, les aides des collectivités locales, le travail au noir et le recours, comme autrefois, au troc et à l’échange, nombre d’actifs vivent mieux qu’avec un poste traditionnel. Sans doute n’est-ce pas un choix fait de gaieté de cœur, mais il relève d’une démarche logique d’agents économiques conscients des règles du jeu. […]
Qui a vu fonctionner le marché du travail dans le monde rural et a fortiori dans le sud de la France, sait qu’il ne s’agit pas de quelques milliers de déviants mais de centaines de milliers de personnes réfléchies […]
Les ramener dans la sphère productive suppose, d’une part de modifier les systèmes d’aide, de manière à recréer une véritable incitation au travail, et d’autre part de sanctionner, par la suppression des indemnités, les refus réitérés d’emplois. […]
De là le recours inévitable à l’immigration. L’opinion publique en prend progressivement conscience, qui ne croit plus aux fadaises de l’immigration zéro et autres fantasmes marqués au coin de la pure xénophobie. »
Il s'agit des chantiers à mettre en place pour que la France récupère son "retard".
J'ai mis en gras ce qui saute aux yeux à la lecture, avec dans l'ordre :
- Une tentative audacieuse de passer du concept de plein emploi pour la société (qui est vu comme possible un peu avant) à celui d'un plein emploi sectorisé. ???.
- Une petite couche de peinture sur les acteurs économiques rationnels cher à Ricardo. Peu importe la réalité et la diversité des situations : si un penseur classique l'a dit, cela devient automatiquement une vérité universelle.
- Un passage dans le sud de la France pour s'en convaincre : je suppose que dans le Pas-De-Calais, les chômeurs longue durée ne sont ni déviants ni rationnels d'oublier la vie misérable avec un alcoolisme de masse payé par les allocs.
- En embuscade, le retour à la solution libérale par excellence : l'immigration.
On remarquera au passage la prédiction sur l'opinion publique apaisée face à cette thématique
Merci Alain pour tous ces moments.
SojaMoule : "Tu perds ton temps, c'est l'asile et je t'emmerde. Dans ta forteresse de certitudes apprises à l'école ou dans tes lectures, tu n'es pas le dépositaire de la vérité absolue."
Reblochon : "As-tu quelque chose d'intéressant et constructif à dire ? Oui ? Lâche toi ! Non ? TA PUTAIN DE GUEULE D'ATTARDÉ, tu la fermes. Bisous"